Dans le cadre des policy lectures de l'AMSE, Joseph Stiglitz a tenu une conférence publique vendredi 11 octobre 2019 à Marseille. Ce fut l'occasion pour le prix Nobel d'économie de présenter son nouveau livre Peuple, pouvoir & profits (éd. Les Liens qui Libèrent). La conférence s'intitulait "Le capitalisme à l'heure de l'exaspération sociale" et a été diffusée en direct sur Radio Grenouille 88.8 FM : Depuis plusieurs décennies, Joseph Stiglitz développe une critique forte du néolibéralisme. Il dénonce la foi aveugle dans les marchés libres et sans entrave. Il fustige la mondialisation qui étrangle les pays en développement. Il condamne la libre circulation des capitaux qui aboutit à des crises financières. Il met en garde contre le creusement des inégalités. Joseph Stiglitz, prix Nobel d’économie, a été économiste en chef de la Banque mondiale. Il a publié de nombreux ouvrage, parmi lesquels Le prix de l’inégalité ou Le triomphe de la cupidité (Les Liens qui libèrent). © Reda Settar
Toutes ces évolutions sont liées à la présence des grandes entreprises. Grâce à leur « pouvoir de marché », elles exploitent aussi bien leur personnel que leurs clients pour accroître leurs profits. Ces profits leur permettent d’« acheter » le pouvoir politique afin qu’il légifère selon leurs désirs, et non dans l’intérêt du peuple. Mais ce dernier n’en peut plus. Il veut que cela change.
Entrent alors en scène des démagogues qui, pour tirer parti de cette colère, élaborent une critique superficielle de la mondialisation. Fondée sur l’hostilité à l’égard des migrants et le protectionnisme, celle-ci trouve un large écho auprès des victimes de la désindustrialisation. Ces nouveaux populistes ont également l’appui des grandes entreprises, et pour cause : ils travaillent pour elles, notamment en leur accordant des réductions d’impôts massives et en déréglementant. Pour combien de temps ?
Dans ce livre, Stiglitz ne se contente pas d’analyser avec finesse les grands problèmes actuels de l’Occident (l’anémie de l’économie, le pouvoir des monopoles, la mauvaise gestion de la mondialisation, la financiarisation abusive, le changement technologique mal maîtrisé). Il propose aussi un tournant radical : un programme économique et politique progressiste. À ses yeux, il est urgent de mettre en œuvre une politique sociale ambitieuse autour d’une idée forte : l’« option publique ».
Car c’est en s’attaquant de front au pouvoir et aux profits des grandes compagnies que le peuple pourra enfin espérer vivre décemment.