En suivant la voie ouverte par Philippe Van Parijs dans sa critique de Rawls, cette conférence montrera qu’il est possible d’associer les États européens par des règles distributives plus exigeantes que le simple devoir d’assistance. Le marché intérieur crée une situation d’injustice pour les victimes de l’ouverture des marchés et des sociétés. Certains arrêts de la Cour de justice de l’Union européenne ont affirmé le primat des normes du marché intérieur sur le droit de grève ou les conventions collectives nationales. De ce fait, la question classique des « circonstances de la justice », c’est-à-dire de l’étendue du domaine au sein duquel il convient d’organiser la redistribution des ressources rares, ne se pose plus seulement au niveau domestique : elle prend sens désormais au niveau européen. 

Encore faut-il savoir comment redistribuer. Cette intervention évoquera d’abord brièvement, pour les réfuter, les réserves des souverainistes comme David Miller contre toute justice post-nationale, sans se rallier pour autant à une défense de la justice cosmopolitique ; puis elle engagera un dialogue critique avec les propositions du philosophe Andrea Sangiovanni en faveur de la solidarité européenne, en tentant de dégager des « principes de justice » valables à cette échelle.